Arraché à un cocon de soie et d’argent pour qu’on l’y dépose dans un couffin de ronces et de lames, d’épines et de larmes. Enfant maudit, fruit des relations illégitimes entre Osiris et sa sœur Nephthyse. On avait détruit sa vie entière, sa propre mère l’avait condamnée à la minute même où elle l’avait mise au monde.  

Il embrassait le royaume des morts comme ascendance mais aussi comme appartenance ; il était liée à ces âmes innombrables et dissemblables, non par le sang, mais par l'esprit. Il était le silence tandis que les terres de la Douât n’étaient que hurlements et bruits de pas précipités, paniqués. Il était l’ordre, d’un noir parfait alors que les âmes errantes étaient le chaos.

Les hommes vivait les batailles en leur cœur. Anubis, vivait l’après. Ce moment suspendu dans le temps, où la bataille prend fin mais qu’un autre combat commence. Celui contre le temps, contre la mort. Il venait prendre la main de certains pour les emmener avec lui, bien loin de l’horreur que l’on trouve dans le monde des vivants.

Il avait vu l’horreur de près. Il connaissait la peur, savait la faim, vivait la douleur.

Mais ainsi, était-il, dieu de l’ailleurs et de l’ici, piégée entre deux mondes.

Juge depuis l'éternité, depuis que le monde était monde, que les temps tournaient tels que nous les connaissions. Dieu du passé, d'une époque oubliée, humilié dans son incarnation. Il était le reliquat décadent d'une ère faste et luxueuse.

Il fallait s'extraire de l'obscurité, maintenant ; revenir, lentement, aux vivants, à la lumière, revenir au reste du monde depuis les noirs tréfonds où il s'était plongé depuis une éternité.